Transition écologique dans les entreprises : comment engager durablement les équipes ?
Publié le 27/05/2025
Transition écologique dans les entreprises : comment engager durablement les équipes ?
Publié le 27/05/2025
Les ressources humaines ont un rôle crucial à jouer pour insuffler une culture d’entreprise propice à la transition écologique jusqu’à l’échelle des salariés. Une étude impliquant Pascal Paillé, chercheur à NEOMA, met en lumière les leviers à actionner pour engager les personnels dans des comportements écoresponsables au travail.
La transition écologique des entreprises n’est plus une option. Entre réglementations de plus en plus strictes et attentes croissantes des citoyens, les organisations doivent agir, non seulement pour la planète, mais aussi pour leur propre pérennité. En effet, 78 % des salariés choisiraient, à offres équivalentes, une entreprise engagée dans la transition écologique. L’environnement est même la première préoccupation des moins de 35 ans. Attirer et fidéliser les talents passe donc par une stratégie écologique crédible. Mais comment opérer ces changements en profondeur ?
C’est là que les ressources humaines (RH) entrent en jeu. Car il ne s’agit pas que de revoir ses processus ou de verdir ses produits. Pour transformer durablement une organisation, il faut embarquer les salariés et ancrer l’écologie dans la culture d’entreprise. Par quels moyens ? La formation est souvent présentée comme le levier numéro un. 86 % des entreprises déclarent d’ailleurs sensibiliser leurs salariés aux enjeux environnementaux. Mais est-ce suffisant ? L’étude menée par le chercheur de NEOMA et ses collègues dévoile que la formation seule ne constitue pas un levier aussi puissant que l’on pourrait le croire.
Contrairement à ce que des recherches antérieures affirmaient, cette nouvelle étude montre que la formation verte n’est pas une condition sine qua non pour engager des employés dans des comportements durables. En effet, il ne suffit pas de connaître les enjeux pour avoir envie d’agir. La formation n’est pas pour autant inutile. Au contraire, les chercheurs supposent que son importance varie selon le niveau d’engagement environnemental d’une organisation. Autrement dit, une entreprise qui débute dans la gestion verte pourrait d’abord miser sur la formation, tandis qu’une entreprise plus avancée pourrait privilégier d’autres leviers.
Alors, quels sont ces leviers ? Les chercheurs insistent sur trois dimensions : la capacité, la motivation et l’opportunité. La capacité, c’est donner aux salariés les moyens d’agir. Concrètement, cela peut passer par des formations sur des pratiques écologiques précises, telles que la sobriété numérique, ou des outils, comme des calculateurs d’empreinte carbone. La motivation, elle, vise à créer un véritable engagement des salariés. Organiser des défis écologiques ou des projets participatifs comme la plantation d’arbres peut être un bon moyen de stimuler cet engagement. Enfin, l’opportunité repose sur la mise en place d’infrastructures favorables. Bornes de recharge, primes pour les trajets à vélo ou en transports en commun, plateformes pour que les salariés expriment leurs idées… Ces conditions permettent aux collaborateurs de mettre en œuvre concrètement ce qu’ils ont appris et souhaitent appliquer. Reste à savoir quels leviers privilégier et actionner.
Les chercheurs sont catégoriques : il n’est pas nécessaire de jouer sur tous les tableaux pour observer des effets positifs. Des actions touchant à la motivation, comme les récompenses et rémunérations, et le soutien de la direction, comme les leviers d’opportunités, sont particulièrement efficaces, ensemble ou séparément. La formation n’est quant à elle pas essentielle.
Par ailleurs, il n’existe pas de recette universelle. Chaque organisation doit adapter ses leviers aux spécificités de son secteur, de sa taille et de son niveau de maturité écologique. Une même entreprise peut également emprunter plusieurs chemins pour susciter des comportements écoresponsables selon les différents profils de ses salariés. L’enjeu est de s’engager sur une démarche cohérente et personnalisable, qui permette à chacun de s’impliquer à son échelle.
Loin de rester un simple effet de mode ou un discours des services de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), la transition écologique est également de plus en plus portée par les salariés eux-mêmes. Cela souligne l’importance des leviers RH susmentionnés. Les entreprises disposant d’équipes déjà engagées écologiquement ont intérêt à miser sur la co-construction d’un plan de transition avec leurs collaborateurs, à la manière d’une opportunité. En effet, l’implication durable des salariés ne repose pas uniquement sur une série de mesures incitatives comme la formation aux écogestes, par exemple éteindre l’ordinateur ou trier les déchets, mais sur des mesures qui prennent en compte leur avis.
L’un des principaux défis pour les ressources humaines sera donc de réussir à coordonner cette dynamique individuelle avec les objectifs globaux de l’entreprise, ce qui pourrait impliquer une remise en question des modes traditionnels de gestion. Les salariés, souvent relégués au rôle de simples exécutants des politiques écologiques décidées en haut lieu, seront désormais des parties prenantes au changement.
Paillé, P., Valéau, P. and Azeem, M. (2024). Configurations of green human resources practices for environmental sustainability. Revue de gestion des ressources humaines, n° 134(4), 3-20. https://doi.org/10.54695/grhu.134.0003